Aller au contenu principal

RICARDO ARDUENGO, INONDATIONS VUES D’UN DRONE, PUERTO RICO, SEPTEMBRE 2017


LE PHOTOGRAPHE

Ricardo Arduengo est un photographe indépendant basé à San Juan, à Porto Rico. Avant de se consacrer au photojournalisme, il a passé 9 ans comme journaliste vidéo pour Channel 2 News Telemundo – NBC/Universal Puerto Rico. Au cours des dix dernières années, il a couvert de nombreux événements dans les Caraïbes (comme le tremblement de terre d’Haïti en 2010), en Amérique centrale et aux États-Unis, notamment pour de grandes agences comme The Associated Press et l’AFP.

Son compte Twitter

Son compte Instagram

LA PHOTOGRAPHIE

Légende de l’AFP

Un homme emprunte le rail de sécurité d'une autoroute inondée, à San Juan (Porto Rico), le 21 septembre 2017, le lendemain du passage de l’ouragan Maria (AFP/Ricardo Arduengo).

Le contexte

Entre le 18 et le 19 septembre 2017, dans une région déjà éprouvée quelques jours plus tôt par la tempête tropicale Irma, l'ouragan Maria frappe d’abord la Guadeloupe, faisant au moins deux morts. L'île de Porto Rico est touchée de plein fouet le mercredi 20 septembre par le plus puissant ouragan à avoir balayé ce territoire depuis 1928.

Le Huffington Post, 20 septembre 2017, Ouragan Maria : les images de Porto Rico frappée par "l'ouragan le plus dévastateur" de son histoire.

Les destructions sont énormes, causées par des vents soutenus de plus de 200 km/h. Le bilan officiel de 64 morts fait l’objet d’une polémique et . À la suite d’une étude indépendante, il est réévalué, bondit quelques mois plus tard, à 2975 victimes (plus de 40 fois plus).

Le Monde, 29 août 2018, Ouragan Maria à Porto Rico : le bilan officiel passe de 64 à 2 975 morts.

Ce bilan officiel est contesté par Donald Trump, alors que la gestion de cette catastrophe par son administration était critiquée : Courrier International, 14 septembre 2018, États-Unis. Trump nie le bilan officiel de l’ouragan Maria à Porto Rico.
Le statut de l’île est particulier : elle est un « État libre associé » aux États-Unis. Ses habitants sont des citoyens américains… mais ils n’ont pas le droit de vote aux élections nationales (ils ne peuvent voter qu’aux primaires). Du point de vue géographique, Porto Rico est une île des Antilles de 9000 km2 à l’est d’Haïti, étendue sur 170 km d’est en ouest et 60 km du nord au sud, qui compte près de 3,5 millions d’habitants.

Pour en savoir plus

Le Monde, 29 septembre 2017, Porto Rico : quel statut par rapport aux États-Unis ?
Le Monde, 28 août 2017, Porto Rico, en faillite, se vide de ses habitants.

Cartographie

LE TRAITEMENT MÉDIATIQUE (ET NOTAMMENT PHOTOGRAPHIQUE) DE LA CATASTROPHE

Dans le blog Making-of du 23 octobre 2017, « Le sens des mots », cinq reporters de l’AFP dépêchés sur place, dont Ricardo Arduengo, décrivent la difficulté de rendre compte de la violence de l’ouragan et de ses conséquences par le texte, la photographie ou la vidéo : « Certains mots perdent leur sens si on les utilise trop fréquemment. Une fois qu’on a écrit et lu cent fois “dévasté” et “détruit”, leur force s’étiole. Comment alors décrire l’ampleur des destructions à Porto Rico après que l’ouragan Maria a frappé des pans entiers de ce territoire américain de 3,4 millions d’âmes ? »

Ricardo Arduengo, lui, témoigne de son positionnement particulier lors de cette catastrophe, alors que ses proches étaient concernés : « La maison de ma famille est à Barranquita, au centre de l’île. J’ai dû attendre trois jours avant de pouvoir m’y rendre. Ils ont eu beaucoup de chance, personne n’a été blessé. Il n'y a eu que des branches et une vitre cassées ».

Il explique comment son sens professionnel doit passer avant ses émotions, même si sa position particulière l’engage à couvrir l’événement avec un autre regard et en mobilisant une nouvelle technique, deux éléments qui nous intéressent directement dans l’analyse de ce cliché : « Je suis portoricain et j’ai une certaine expérience de ce genre d’événement. J’étais là pour l’ouragan Irène en République dominicaine en 2011, et en Haïti pour le tremblement de terre de 2010. Mais je n’avais encore jamais été le témoin d’une telle destruction. Certainement pas dans ma patrie d’origine en tout cas. (…) Même si ça me touchait personnellement, je me suis répété sans cesse que c’était avant tout une histoire à couvrir, comme n’importe quelle autre. J’ai donc essayé de bloquer ce que je pouvais ressentir, pour ne pas gêner mon travail. Et j’ai cherché une nouvelle façon de rapporter l’ampleur des destructions, en utilisant de la photo aérienne, réalisée avec l’aide d’un drone. Sans oublier de doubler cette production avec des images au sol et au même endroit. J’ai documenté les destructions de ces deux façons, quasiment partout ».

Voir sur son site les 59 photos qu’il a sélectionnées pour constituer une série sur l’ouragan Maria, alternant images au sol et images de drone.

USAGES MÉDIATIQUES DE LA PHOTO

Cette photo a largement été diffusée dans les médias nord-américains (peut-être en raison du statut particulier de l’île vis-à-vis des États-Unis), britanniques et latino-américains (notamment brésiliens), mais a été moins présente dans les médias français et européens.

Quelques exemples :

La Presse, Montréal, Canada, 21 septembre 2017

Le Devoir, Montréal, Canada, 22 septembre 2017 :

CNN, site de l’édition internationale, 21 septembre 2017, parmi 36 photos, en bas d’article, sur l’ouragan Maria :

PROPOSITION D’ACTIVITÉS

Activité 1 : Analyser avec les élèves l’influence de l’échelle des plans sur notre manière de percevoir une photo et sur les informations transmises.

En effet, une autre photo de Ricardo Arduengo de la même scène mais en plan d’ensemble a été publiée le même jour dans la presse, ici sur le site du Daily Mail :

Légende : Les voitures tentent de traverser les eaux profondes en crue sur une route principale de San Juan, à Porto Rico. L'île a été avertie de se préparer à davantage de pluies torrentielles.

Faire travailler les élèves sur les deux photographies, avec la grille d’analyse de l’image notamment. Quels éléments d’information différents apportent-elles (photos+légendes) ? Qu’apporte le cliché en plan d’ensemble à l’autre photographie ?

Prolonger cette activité avec d’autres photographies de Ricardo Arduengo choisies par les élèves sur son site dans la série sur l’ouragan Maria, alternant images au sol et images de drone.

S’interroger avec eux sur la différence de perception de la catastrophe entre les deux types d’images. Prolonger par une autre question : la multiplication des images de drone dans les photographies de presse modifie-t-elle notre rapport à l’information et notre perception de celle-ci ?

Activité 2 : L’évolution du métier de photojournaliste et des points de vue

Cela poursuit et élargit le travail entamé dans l’activité 1 à partir du travail de Ricardo Arduengo et de ses images de drone. On peut inclure dans cette réflexion sur les changements du métier trois autres séquences de « Trois Regards pour voir » :

  • Usain Bolt aux mondiaux d’athlétisme d’Olivier Morin et Le plongeon de Tom Daley de François-Xavier Marit : nombreux appareils commandés à distance et permettant des points de vue nouveaux, prises de vues sous-marines inconnues jusqu’alors.
  • La femme au chat : portrait d’une femme irakienne d’Odd Andersen, Mossoul, Irak, novembre 2016 : Odd Andersen alterne l’utilisation de la photographie et de la vidéo. L’évolution technique du matériel permet de filmer des vidéos en haute définition et d’en extraire un cliché de très bonne qualité.

Pour prolonger le sujet traité par cette photo :

Avant-Après. Ouragan Maria : Porto Rico, six mois après

Ricardo Arduengo a positionné son drone six mois plus tard, le 19 mars 2018, aux mêmes endroits que pour ses clichés du 21 septembre 2017. Cela est possible grâce à la géolocalisation très précise des photos dans les nouveaux appareils photographiques et les drones. Cela permet de rendre concret pour les élèves le fait qu’une photo est la représentation d’une situation à un moment donné, et que celle-ci évolue dans le temps.

Le Parisien, 20 mars 2018

Vous aimerez aussi...